L'avocat
:
homme affairé ou homme d'affaires ? |
Existe-t-il plus beau métier
que celui daider ses prochains quand ils se retrouvent face à un problème
juridique ? Excepté celui de garagiste, je ne vois pas ! Le droit est un monde qui effraie les profanes, à raison. Entre les lois, les décrets, les circulaires, les arrêtés, la jurisprudence et la réglementation européenne (jen oublie), le droit est un maquis que seuls les professionnels du droit dominent, parfois avec bien des difficultés. Ainsi, dans cet océan de textes, lavocat apparaît comme un îlot salutaire, une bouée de sauvetage qui va vous mener vers la rive et, surtout, la compréhension de votre dossier. Il faut avouer que de nos jours, avec la multiplication des procédures judiciaires et la démultiplication des actions en responsabilité (il ny a plus beaucoup de place pour la malchance dans lesprit des juristes !), lavocat est à la santé psychologique ce que le médecin est à la santé physique : par ses paroles et ses conseils, il va apaiser son client du mieux quil le pourra. Si je me permets de parler ainsi, cest quà mon humble niveau (juriste dans une association de défense de locataires et daccédants à la propriété), je conseille également les gens et leur explique la loi. Jai malheureusement vu des gens qui étaient très déprimés ou apeurés car ne comprenant pas ce qui leur arrivait. Pourtant, lenjeu financier des dossiers que je traite est relativement mineur alors, imaginez langoisse de ceux et celles qui vont consulter un avocat pour une affaire dont lobjet du litige est plus important (matériel ou moral). Il est évident que lavocat ne peut pas travailler gratuitement et que ses années détudes, son savoir et son travail méritent dêtre rémunérés à sa juste valeur. De plus, il faut savoir quil existe une grande disparité de revenus entre les avocats, entre le ténor dune grande ville de province et lavocat débutant dune ville moyenne. Bien sûr, dans lensemble, les avocats gagnent confortablement leur vie mais ce nest que justice (cest la cas de le dire). Où les choses se corsent, cest lorsque certains dentre eux profitent de la faiblesse psychologique de leurs clients pour leur imposer des honoraires exorbitants. Quand un avocat pense dabord à son porte-monnaie plutôt quà son client, on ne peut que sinquiéter. Sil est aisément compréhensible que pour certains avocats, gagnant difficilement leur vie entre laide juridictionnelle versée au lance-pierres par lEtat et des dossiers mineurs, létat de leurs finances soit une préoccupation majeure, cest inacceptable de la part davocats installés dans le métier depuis de longues années et jouissant de revenus confortables. Nayant plus à craindre de soucis matériels, ne devrait-il pas faire preuve de philanthropie envers ceux qui leur ont fait confiance et dont les honoraires pèsent fortement sur le budget familial. Cest en tout cas mon avis mais je suis peut-être naïf. Cest dans le cadre de mon travail que jai été amené à constater une telle dérive. Voici deux exemples. Lajout de quelques lignes à des conclusions déjà rédigées auparavant a ainsi été facturé plus de 450 euros alors que la première mouture en avait coûté plus de 350, soit un total supérieure à 800 euros pour un document de 12 pages. Sur le fond, il ny a absolument rien à dire : les honoraires sont libres et le client aurait dû prendre la précaution de négocier le tarif horaire. Moralement, je considère que cest abuser de la situation, notamment avec ce client qui lui avait confié trois dossiers, preuve de sa confiance, et qui est particulièrement anxieux. Nous avons demandé à lavocat de faire un geste et de ne pas facturer les 450 euros dhonoraires, au vu de ceux que son client lui avait déjà versés dans le cadre des trois dossiers. Il nous a répondu quil navait pas la chance de pouvoir travailler gratuitement. Un sou, cest un sou ! Autre avocat, même mentalité. Il envoie un courrier à ses clients en les prévenant que sil nest pas payé du solde de ses honoraires, il ne les défendra pas. Ici encore, cest totalement légal et il ny a rien à redire dun strict point de vue juridique. Par contre, moralement, quen penser ? Les personnes ne peuvent plus loger dans leur domicile en raison du très mauvais état de leur appartement et dune installation électrique dangereuse. Ils sont obligés de vivre à une cinquantaine de kilomètres de ce logement, dans de la famille. La femme, qui était la seule à travailler, a dû prendre un arrêt maladie car elle fait une dépression (et puis comment se serait-elle rendue à son travail, distant de plusieurs dizaines de kilomètres, sans voiture). Financièrement, la situation a empiré et au milieu de tout cela, voilà leur avocat qui leur annonce quil attend son argent alors quil devrait être un pilier pour ces gens déboussolés, un soutien moral. Cet avocat est-il humain, a-t-il rencontré ces gens, les a-t-il vus, a-t-il conscience de la gravité de sa menace ? 400 euros de plus le rendront-ils plus heureux au point de le pousser à une telle inhumanité et à oublier sa mission première, aider les gens. Ce comportement nest évidemment pas propre aux avocats et nest que le reflet de notre société mais il me choque particulièrement de la part de professionnels ayant autant de responsabilités et quon ne peut accuser dêtre inculte. Il est dommage que cette profession aussi noble soit touchée par la course au profit, au détriment des personnes faisant appel à leurs services et de la notion de justice. Est-ce que celui qui gagne 2000 euros par mois est moins heureux que celui qui gagne 4000 euros par mois ? Ce qui est important, ce nest pas davoir beaucoup dargent, cest davoir assez dargent pour vivre dignement. Mais je suis naïf. |
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